Table des matières
Introduction
Définitions
Rôle de l’oxygène
Rappels de physiologie
Mesure de l’oxygène dans l’organisme
Introduction
L’administration d’oxygène est un acte médical qui doit être effectué sous la supervision d’un-e professionnel-le habilité-e. Bien qu’il s’agisse d’un médicament fondamental à la prise en charge de nombreuses urgences, son utilisation inappropriée est potentiellement dangereuse. A l’issu de la formation adaptée (introduite au niveau IAS 3), certain-e-s secouristes peuvent se voir autoriser l’utilisation de l’oxygène par le/la médecin référent-e (acte médical délégué). La formation IAS 3 à elle seule ne suffit en effet pas à pouvoir recourir à l’oxygène de manière autonome. Voici le premier article d’une série consacrée à l’utilisation de l’oxygène en situation d’urgence.
Définitions
L’oxygène que nous respirons est présent sous forme d’une molécule de dioxygène. Deux atomes d’oxygène sont liés ensemble, raison pour laquelle on parle d’O2. Par abus de langage, on utilise « oxygène » comme synonyme de « dioxygène ». Le gaz carbonique est quant à lui produit par les cellules lors de l’utilisation de l’oxygène pour la production d’énergie. On parle aussi de « dioxyde de carbone » ou « CO2 ». Notre organisme ne peut pas utiliser ce gaz inerte et doit l’évacuer.
Rôle de l’oxygène
La présence d’oxygène est une condition fondamentale à la vie car sa présence est nécessaire pour permettre le métabolisme cellulaire (production d’énergie par les cellules), et donc le fonctionnement des différents organes et systèmes du corps. En présence d’une quantité insuffisante d’oxygène dans l’organisme, on parle d’hypoxie.
Physiologie de la respiration

Figure 1 : Circulation pulmonaire et systémique, impliquant respectivement les cavités droites et gauches du cœur.Le chemin que l’oxygène emprunte pour se rendre de l’air inspiré jusque dans les cellules est complexe. Lors de la respiration, l’air (contenant 21% d’oxygène) pénètre dans l’organisme par les voies respiratoires supérieures (bouche, nez, pharynx). Il passe au travers de la glotte (larynx) et transite par les voies respiratoires inférieures (trachée, bronches) jusqu’aux alvéoles pulmonaires. C’est ici qu’a lieu l’échange de l’oxygène contenu dans l’air contre le gaz carbonique contenu dans le sang. Une fois dans le sang, l’oxygène se fixe à un atome de fer sur une protéine appelée hémoglobine. Celle-ci est contenue dans les globules rouges (érythrocytes).
La circulation du sang dans les veines pulmonaires ramène les globules rouges riches en oxygène au cœur (oreillette gauche). Celui-ci se charge ensuite de distribuer le sang chargé en oxygène au reste du corps par la circulation systémique.
Une zone du système nerveux analyse continuellement les gaz contenus dans la circulation sanguine et contrôle la respiration en conséquence. En temps normal, les variations du gaz carbonique reflètent étroitement l’activité cellulaire (plus d’énergie produite = plus de CO2 produit). Ainsi, en surveillant le taux de CO2 dans le sang, notre système nerveux adapte rapidement notre respiration à nos besoins. Le taux d’oxygène dans le sang, quant à lui, varie plus tardivement. Chez les personnes en bonne santé, c’est donc l’augmentation du gaz carbonique dans le sang qui déclenche périodiquement notre respiration. Cette notion est importante pour comprendre certains effets néfastes d’un surdosage en oxygène. Ceux-ci seront abordés dans la seconde partie de cette série d’articles.

Figure 2 : Etapes importantes des échanges gazeux. Dans les capillaires pulmonaire, l'oxygène (flèche violette) quitte les alvéoles pulmonaire et se fixe sur l'atome de fer contenu dans l'hémoglobine des globules rouges. Une fois dans les tissus périphériques, l'oxygène est relâché pour être utilisé par les cellules.Mesure de l’oxygène dans l’organisme

Figure 3 : Principe de fonctionnement du saturomètre. L'onde lumineuse traverse les vaisseaux capillaires et change de longueur d'onde. La longueur d'onde de la lumière sortante détermine la quantité d'hémoglobine saturée en oxygène. Illustration fournie par mediprostore.com.Le sang transporte l’oxygène de deux façons :
- à 98% en liant les molécules d’O2 sur les atomes de fer présents dans l’hémoglobine des globules rouges.
- à 2% en dissolvant l’O2 dans l’eau du plasma (à la façon d’un « Soda-Club »).
A la pression atmosphérique, la part dissoute dans le sang est donc quasi inexistante (2%). Seule la quantité d’oxygène transportée par l’hémoglobine (98%) participe de façon significative au métabolisme. Pour mesurer la quantité d’hémoglobine chargée en oxygène (dite « saturée » en oxygène), on effectue idéalement une prise de sang artérielle. Dans les premiers secours, hors du confort hospitalier, on estime le contenu en oxygène du sang à l’aide d’un oxymètre de pouls ou saturomètre. Celui-ci exploite les propriétés colorimétriques de l’hémoglobine afin de calculer la proportion saturée en oxygène. En effet, l’hémoglobine chargée en oxygène n’a pas exactement la même couleur rouge que l’hémoglobine « vide ». Concrètement, une lumière d’une longueur d’onde définie est projetée sur les vaisseaux sanguins et est reflétée par ceux-ci. Un capteur analyse la couleur de la lumière reflétée et l’appareil calcule la quantité d’hémoglobine saturée en oxygène. On parle aussi de SpO2 pour « saturation pulsée en oxygène ».
Toutefois, contrairement à une prise de sang, différents facteurs influencent le fonctionnement du saturomètre en perturbant la lecture de la couleur de l’hémoglobine ; le froid, un état de choc circulatoire et certains vernis à ongles peuvent entraver ou même rendre impossible la mesure de la SpO2. De plus, les saturomètres conventionnels peuvent donner un résultat de saturation faussement élevée lors de certaines intoxications qui faussent la couleur de l’hémoglobine (voir « monoxyde de carbone » dans les prochaines partie de cette série d’articles).
Chez une personne en bonne santé (non fumeuse et à basse altitude), la saturation en oxygène de l’hémoglobine doit être au minimum supérieure à 94%. C’est-à-dire que 94% de l’hémoglobine doit transporter de l’oxygène dans la circulation artérielle. Une SpO2 inférieure à 94% est, chez la plupart des patient-e-s, le signe d’une hypoxie. Toutefois, la valeur limite entre saturation normale ou hypoxie varie d’un-e patient-e à l’autre, et il serait donc faux (et potentiellement dangereux) de souhaiter une SpO2 supérieure à 94% chez tous/toutes les patient-e-s.
Comme souvent quand il s’agit du corps humain, la notion de “normalité” doit être adaptée selon la situation. Nous discuterons ce principe plus en détails dans les prochains articles de cette série sur l’oxygène qui s’intéressera aux conséquences et aux causes de l’hypoxie, aux effets d’un surdosage en oxygène, ainsi qu’à quelques cas particuliers qui rendent la valeur de saturation (SpO2) peu utile pour guider la thérapie.
Ainsi s’achève le premier article de la série que nous consacrons à l’oxygénothérapie dans les premiers secours. Nous vous invitons à déposer vos commentaires et remarques ci-dessous :-).



Bonjour,
je travaille dans un cabinet privé d’imagerie médicale. Doit on obligatoire etre équipé d’oxygène sachant que le samu est à 5 minutes et que nous ne savons pas tous manipuler la bouteille ?
Je ne trouve aucun texte de loi en relation avec ce sujet.
La médecine du travail de rattachement ne sait pas me dire.
Merci
Chère Madame,
Je vous remercie pour votre question. Toutefois, j’ai le sentiment que vous trouverez une réponse plus appropriée en l’adressant à une autorité sanitaire en France (vous mentionnez le SAMU), et non sur un blog de secourisme associatif en Suisse.
Sans la moindre connaissance du cadre réglementaire français, je pense que la nécessité de matériel d’urgence (et surtout de la formation adaptée) dépend du catalogue de prestation que votre centre fournit. S’il s’agit de radiologie conventionnelle, mammographie, ultrason, je peux m’imaginer qu’une formation de base de réanimation cardio-pulmonaire pour votre personnel et la présence d’un défibrillateur (semi-)automatisé dans le centre n’est pas un luxe. Dans la mesure où votre centre réalise des examens avec produit de contraste intraveineux (CT, IRM, US contrasté), je crois qu’il est nécessaire que votre centre puisse prendre en charge les complications iatrogènes fréquentes, en particulier les réactions anaphylactiques. Dans ce cas précis, la présence d’oxygène, d’un chariot d’urgence, ainsi que de la formation adaptée me paraissent indiscutables.
J’ai trouvé via Google quelques références sur le sujet qui concernent votre question :
– Journal « Le médecin radiologue », édition 341 de novembre 2011, page 18 : « Les procédures d’urgence : désormais une obligation professionnelle. (…) l’obligation d’équipement avec un chariot d’urgence mais également sa légitimité médicale et de leader d’équipe imposent (au radiologue) une formation à la gestion des urgences en radiologie. Le radiologue est également l’interlocuteur naturel du régulateur du SAMU pour les décisions d’orientation et de traitement éventuels. Cette procédure doit être connue de toutes les personnes concernées, impliquant une formation initiale ainsi qu’aux gestes et soins d’urgence. De même, la présence d’un ou plusieurs chariots d’urgence est obligatoire sur site. »
– Référentiel LABELIX de labellisation en imagerie médicale V 2.4, édition 2016, point 7.2 : « 7.2 Un ou plusieurs chariot(s) d’urgence médicale est(sont) disponible(s) dans le site d’imagerie. Le chariot d’urgence est facilement accessible. Il contient les médicaments et le matériel nécessaire pour répondre aux situations d’urgence. Le chariot est entretenu et vérifié régulièrement. Tous les personnels concernés connaissent l’existence et le lieu de rangement du chariot d’urgence. »
A la lumière de ses informations, il me semble clair que la proximité du SAMU n’est pas suffisante et que l’équipement de réanimation (y.c. oxygène) et la formation nécessaire à sa manipulation sont une obligation. A titre de comparaison, les services d’imagerie dans les hôpitaux (situés bien souvent à quelques dizaines de mètres des urgentistes), sont aussi pourvus de défibrillateurs et d’oxygène, et leur personnel est tenu de suivre une formation en réanimation cardio-pulmonaire.
J’espère avoir pu vous aider et vous invite à vous adresser aux autorités compétentes pour davantage de précisions.
Meilleures salutations,